Tristesse, inquiétude et détermination – 08.03.2024
Chaque vendredi, à 7h04, 10h27 et 19h39, sur Radio Notre Dame, Mgr Matthieu Rougé, évêque de Nanterre, relit à la lumière de l’Evangile les temps forts de l’actualité de la semaine.
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Le vote du congrès de lundi dernier, inscrivant le droit à l’interruption volontaire de grossesse dans notre constitution, plonge beaucoup de chrétiens, mais aussi d’hommes et de femmes de bonne volonté attachés au plein respect de la dignité humaine, dans la tristesse et l’inquiétude.
Tristesse parce que la culture de mort semble aller de victoire en victoire dans notre pays. On a l’impression que certains politiques ont fait leur le cri atroce qui retentissait durant la guerre d’Espagne : « viva la muerte ! », « vive la mort ! ». La vraie réponse aux souffrances, des femmes en particulier, ne peut en rester à l’universalisation de la vie interrompue.
Tristesse et inquiétude, parce que la clause de conscience des médecins semble aujourd’hui fragilisée. Certes, le Garde des sceaux et la Ministre des Solidarités ont assuré qu’elle ne serait aucunement remise en question. Mais certains juristes et certains militants se sont empressés de brandir la hiérarchie des normes pour demander la fin de la clause de conscience, faisant, au-delà même de la question de l’avortement, peu de cas de cette expression par excellence de la responsabilité et de la dignité humaines que constitue la conscience.
Face à des évolutions législatives perçues comme inexorables, certains chrétiens sont tentés par le découragement. « Le démon de mon cœur s’appelle ‘’à quoi bon ?’’ », écrivait Georges Bernanos au début de ses Grands cimetières sous la lune. Il faut résister à ce démon.
« En dépit des vertus héroïques des saints, les royaumes de ce monde resteront des royaumes de concupiscence jusqu’au jour du Jugement, écrit le philosophe Pierre Manent pour résumer la pensée de Pascal. Cette franche acceptation de la ‘’vérité effective’’ de la condition humaine est déterminante pour la juste manière d’appréhender la question politique ».
Il ne faut pas nous étonner des violences et des injustices du monde : elles font partie et feront toujours partie de la condition humaine blessée. Mais elles ne doivent pas nous décourager, au contraire, d’y plaider et d’y agir, sans nous lasser, à temps et à contre-temps, sans l’illusion de victoires mondaines immédiates ou complètes, en faveur de la dignité humaine, de la justice et de la paix.