Messe Chrismale – 26.03.2024
Homélie de Mgr Matthieu Rougé lors de la messe chrismale 2024.
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Chers frères et sœurs,
Il y a quelques mois, un grand n’ombre de fidèles du diocèse s’est réuni à Passy-Buzenval pour une journée de prière et de formation à la prière intitulée, vous vous en souvenez : « Allons à la Source ! ». C’était une manière de mettre en œuvre ce que nous avions médité ici même l’an dernier : le nécessaire enracinement dans une synodalité contemplative de la synodalité délibérative et missionnaire.
C’était aussi notre façon d’entrer dans « l’année de la prière » décidée par le Pape François pour préparer l’Eglise universelle au grand jubilé de 2025. Aller à la Source : voilà ce qui nous rassemble encore ce soir puisque nous nous dirigeons vers la Source par excellence, le côté ouvert de Jésus sur la Croix, d’où jaillit l’eau du baptême et le sang de l’eucharistie, auxquels vont avoir part pour la première fois tant de nos frères et sœurs catéchumènes dans la nuit sainte de Pâques. Les huiles que nous avons la grâce de bénir et de consacrer ce soir proclament par avance les bienfaits de ces mystères.
- L’huile des malades est bénie la première comme sont et doivent être à la première place dans l’Eglise les malades et tous ceux qui souffrent d’une manière ou d’une autre. Cette huile est destinée à « rendre vigueur » aux corps souffrants, à donner de la force aux cœurs blessés mais, magnifique paradoxe proprement chrétien, c’est par sa douceur qu’elle y parvient. Rien de fort nous le savons ne s’accomplit sans douceur, à l’école de Celui qui dispose de toutes choses « avec douceur et avec force », « suaviter ac fortiter » comme dit le Livre de la Sagesse (8, 1). Avec douceur et avec force, l’huile des malades est appelée à « soulager le corps, l’âme et l’esprit des malades », à « chasser toute douleur, toute maladie, tout mal physique, moral et spirituel ». Voilà qui prend une signification singulière au moment où notre pays est engagé à nouveau dans un débat très sensible sur le juste accompagnement de la fin de vie. Avec la grâce de Dieu, les chrétiens et tous les hommes et femmes de bonne volonté, médecins comme accompagnants de tous niveaux, sont appelés à soulager, à lutter contre la douleur et tout mal spirituel, en respectant sans réserve la dignité et l’intégrité de toute vie humaine même particulièrement fragilisée.
- C’est ensuite l’huile des catéchumènes que nous bénirons. « Recevant de toi intelligence et énergie, proclame la prière de bénédiction, [les catéchumènes] comprendront plus profondément la Bonne Nouvelle et s’engageront de grand cœur dans les luttes de la vie chrétienne ; rendus capables de devenir tes fils adoptifs, ils seront heureux de naître à nouveau et de vivre dans ton Eglise ». Quelle grâce pour notre Eglise d’accueillir d’année en année, cette année particulièrement, des catéchumènes de plus en plus nombreux, adultes mais aussi collégiens et lycéens ! Leur présence est une invitation pressante à les accueillir et à les intégrer avec soin, et à progresser tous dans la compréhension de la Bonne Nouvelle et dans l’engagement dans le combat spirituel. Le nombre et la soif des catéchumènes nous encouragent à avancer dans la « transformation missionnaire » de nos communautés. Beaucoup d’initiatives locales, les débuts de l’« Académie Kerygma », notre école diocésaine de la première annonce, les « congrès mission en paroisse » qui se préparent pour l’automne constituent comme une onction d’huile des catéchumènes répandue sur tout le territoire confié à notre zèle missionnaire.
- Après l’huile des malades et l’huile des catéchumènes, le saint chrême où se concentrent les grâces, fondatrices pour la vie ecclésiale, du baptême, de la confirmation et du sacrement de l’ordre. Par cette « onction de joie », nous sommes configurés au Christ « témoin fidèle », « premier-né d’entre les morts », « prince des rois de la terre », comme dit l’Apocalypse de saint Jean, pour pouvoir nous offrir au Père et à nos frères, « par Lui, avec Lui et en Lui ». Sans cette consécration au Christ par la profondeur de l’Esprit, nous ne serions pas le peuple de Dieu, comme dit la Première Lettre de saint Pierre, nous ne serions pas ce « peuple destiné au salut, pour que [nous annoncions] les merveilles de celui qui [nous] a appelés des ténèbres à son admirable lumière » (1 P 2, 9). Nous ne progresserons en juste synodalité, c’est-à-dire en synodalité missionnaire, que si nous progressons toujours davantage dans la célébration et l’accueil en profondeur du baptême, de la confirmation, de l’eucharistie et du sacrement de l’ordre. C’est cela qui est en jeu, ce soir dans le renouvellement des promesses d’ordination, jeudi soir dans la mémoire de l’institution de l’eucharistie, dans la nuit de samedi avec la profession de foi des catéchumènes et le renouvellement de la profession de foi baptismale de tous les fidèles : l’accueil avec plus d’intériorité, d’intimité, de disponibilité et donc de fécondité, de l’onction, de l’effusion, de la consécration de l’Esprit.
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Le saint chrême, l’huile des catéchumènes et l’huile des malades portent et signifient notre vocation, commune et différenciée, à la consécration en vue du double témoignage de la foi et de la charité. Voilà qui va pouvoir se déployer avec une ampleur renouvelée durant le grand jubilé de 2025. La rencontre diocésaine de Equipes d’animation pastorale le 23 novembre 2024, le parcours diocésain de contemplation du Christ consusbtantiel au Père notre unité, la célébration commune de Pâques avec tous les chrétiens le 20 avril 2025, le pèlerinage diocésain des acteurs de la mission à Rome du 8 au 11 mai 2025, le pèlerinage de toutes les paroisses du diocèse à Notre-Dame de Paris au printemps 2025, la participation au jubilé mondial des jeunes en juillet 2025, en partant par Turin et en rentrant pas Assise, seront certaines des occasions d’accueillir les grâces du jubilé et des 1700 ans du concile de Nicée. Que saint Maurice co-patron de la cathédrale, soldat de la légion thébaine à qui sont si attachés nos frères et sœurs coptes, sainte Géneviève, vénérée par nos frères et sœurs orthodoxes, et Notre-Dame de Boulogne, dont le sanctuaire sera prochainement, si le Saint-Siège y consent, érigé en basilique intercèdent pour que notre diocèse porte de beaux fruits de vocations et de mission. Amen !
+ Matthieu Rougé, 26 mars 2024